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Choisir son écran et le calibrer

Les livres juridiques de Joelle VERBRUGGE chez 20Bis Edition

Depuis que les capteurs chargés de millions de pixels ont remplacé nos bonnes vieilles bobines de film photosensible, les projecteurs de diapositives se sont vus remisés au fond de nos placards. L’écran d’ordinateur a pris d’une certaine façon la place du projecteur et de la toile qu’il nous fallait installer dans l’obscurité afin de passer des moments conviviaux, au son du chargeur de diapositives. L’écran est depuis, devenu le support principal sur lequel nous regardons ou partageons nos clichés.

Introduction

L’arrivée du numérique a joué un rôle important, tant dans l’évolution que la démocratisation de la photographie. Malheureusement si celle-ci a rendue nos outils de capture et de post-traitement plus performant et plus précis elle a également creusé un fossé entre ce qui se fait de mieux et le matèriel d’entrée de gamme.

Vous l’aurez compris nous allons nous intéresser dans cet article aux écrans informatiques. Ils affichent nos photos pendant toute la phase de post-traitement, qui est devenue incontournable en photographie numérique. Les écrans sont également vos supports d’affichages lors du partage par le web.

Comment peut-on espérer retoucher la luminosité, le contraste, la couleur etc… d’une image si la photographie affichée par l’écran est elle-même détériorée par une luminosité excessive de l’écran, un contraste faible ou une infidélité des couleurs ?

Si vous avez investi plus de 1000 € dans un boîtier, trépied, optique, sac, carte, batterie… il serait tout de même dommage de ne pas se donner les moyens de voir pleinement le résultat ! Avoir acheté du matériel de qualité pour au final « amoindrir » celle-ci par une mauvaise retouche ou un mauvais aperçu de vos photographies, c’est ce qui vous attend avec un écran inadapté à vos besoins ou encore une dalle non calibrée. Un moniteur qui donne trop de luminosité (c’est le cas de la majorité des écrans) va vous donner envie de diminuer celle-ci sur vos photographies alors qu’elle est bonne ! Un contraste trop faible : c’est dans les zones sombres que le problème se pose, vous voilà encore une fois à faire une retouche qui dégrade votre photographie. Une mauvaise température, une dominante ou une dérive des couleurs et cette fois la retouche devient tout simplement dramatique. Vous avez l’impression d’avoir la photo parfaite, qui correspond a votre idée de départ, mais malheureusement ce n’est pas le cas, une impression, un tirage, une diffusion sur le web et vous voilà à partager une photographie qui n’est pas la même !

Aujourd’hui on peut, pour 40€, trouver une sonde spyder2 d’occasion, sur le marché du neuf on trouve un écran SRGB correct pour 250 euros. Au final nous parlons là d’un investissement de moins de 300 € ! Est-ce si énorme que cela en comparaison de l’investissement pour votre matériel photo ?

Il est très rare de trouver des écrans grand public suffisament proches de la réalité pour ne pas avoir besoin d’être calibrés.  Si votre écran vous semble « bon » c’est avant tout une histoire d’habitude !

L’utilité d’un calibrage

Voici deux photos, l’une est un aperçu de la photographie affichée sur un écran calibré. L’autre est affichée sur un écran non calibré. Ne vous basez pas sur celle qui vous semble la meilleure (les goûts et les couleurs….), mais bien sûr la différence entre chaque image !

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Les différences les plus visibles, même pour un oeil non averti :

  • Il y a une variation de la température générale de la couleur,
  • Les gris ne souffrent pas de la même différence de couleur que le reste de l’image,
  • On observe aussi une différence énorme dans les ombres principalement au niveau de l’intérieur de l’aile droite ; sur une photographie les détails sont visibles, sur l’autre ils ne le sont pratiquement plus. Il en va de même sur la partie supérieure de l’aile gauche.

J’ai volontairement choisi de vous présenter une photographie type avec des différences assez représentatives de la majorité des cas. Avec certaines, les différences sont bien plus importantes !

Choisir son écran
Le gamut et les profils colorimétrique (Adobe RGB, Srgb …)

Définition de gamut : Il s’agit de la gamme de couleurs affichables par votre matériel de restitution des couleurs (écran ou imprimante). Dans le cas des écrans, on parle soit de gamut limité (taillé pour travailler en sRGB) soit de « Wide gamut » (compatible avec les espaces les plus larges tel l’Adobe98).

Le gamut d’un écran est le premier paramètre à définir lors du choix de celui-ci, vous avez deux possibilités qui vont dépendre de vos moyens, mais surtout de la destination de vos tirages ! On représente le gamut par un diagramme chromatique, à l’intérieur duquel vient s’incruster un triangle représentatif des couleurs affichables ou d’un espace de couleur. Les sommets de ces triangles correspondent aux couleurs primaires rouge, verte et bleue dans le cas d’un écran.

Gamut de deux ecrans profilé

Sur cette parabole de couleur, le triangle rouge représente les couleurs affichables par l’écran de mon pc portable, une fois celui-ci calibré. Le triangle bleu correspond à un écran LG d’entrée de gamme.

Sur celle-ci, on retrouve le triangle rouge matérialisant les couleurs affichables par l’écran de portable. On peut y voir également les espaces sRGB (en vert) et Adobe RGB (en mauve). Observer bien que l’écran n’est absolument pas capable d’afficher correctement les couleurs, même d’un espace colorimétrique de base !

Cette fois, nous comparons le gamut d’un écran LG aux espaces colorimétriques sRGB et Adobe RGB. L’écran est presque capable d’afficher complètement le sRGB. En réalité, il est même capable de reproduire un peu plus de teintes vertes et rouges que l’espace de base, mais se retrouve limité dans les bleus.

 

Le sRGB … Destination : Web et Labo

C’est le cas de « tous » les écrans, ils le font plus ou moins bien selon les cas, l’espace colorimétrique : sRGB correspond à un espace standardisé et restreint utilisé sur le web, par les minilabs et autres types de développement profilés : sRGB.

Certains écrans bas de gamme ne sont pas capables d’afficher correctement l’espace sRGB, il convient donc de prêter une attention particulière au gamut, même dans cette gamme qui peut pourtant paraitre comme la gamme de base.

 

Le gamut étendu (Wide gatmut) … Destination Tireur, Impression

Bien entendu ces écrans sont parmi les meilleurs, il vous faudra sortir quelques centaines d’euros (les premiers prix en 22 » eizo ou 24 » Dell  : 500 €) mais seuls ces écrans vous permettent de travailler dans une étendue de couleur aussi large que le matériel d’impression.

 

Vous l’aurez compris, travailler vos fichiers en Adobe98 sur un écran à gamut limité est tout simplement une erreur fondamentale, dans ce cas de figure lors du post-traitement vous modifiez des couleurs et détails invisibles ! Si par manque de moyens vous décidez d’acheter un écran sRGB, lors d’un tirage ou d’une impression il vous faudra bien prendre en compte la part de hasard ! Ou trouver un tireur qui reprend avec vous le post-traitement sur son matériel capable d’afficher une gamme large de couleurs. L’autre solution est de profiler votre fichier destiné à l’impression en sRGB et perdre une partie de la gamme de couleurs, mais ainsi maîtriser parfaitement votre production.

Le choix de la dalle

Voici un deuxième paramètre à prendre en compte, le type de dalle ! La technologie idéale n’existe pas, il faut donc faire en fonction de nos besoins et de notre utilisation. Pour cela je vais vous lister les différents modèles existants en citant pour chaque type de dalle leurs principaux avantages et leurs inconvénients :

TN : leur angle de vision n’est pas très bon celui-ci assombrit l’écran lorsque l’on baisse le point de vue, les noirs sont bons grâce a un bon contraste, l’homogénéité de la luminosité n’est pas toujours correcte, le rapport qualité/prix est assez bon avec cette technologie TN qui reste la moins coûteuse à produire, c’est également un type de dalle qui vous fera faire des économies avec une consommation en énergie moins importante. Les dalles TN sont parmi les plus réactives, elles se prêtent bien aux écrans destinés aux jeux vidéos.

 

PVA : pourvue d’un très bon contraste générant une profondeur dans les noirs excellente, des angles de vision larges et une bonne homogénéité.  La technologie PVA reste la plus coûteuse à produire et vient se placer entre les économiques TN et les très coûteuses IPS. C’est, en général, le bon choix si vous destinez votre écran à la retouche photographique.

 

IPS : ces dalles possèdent les angles de vision les plus larges, leur consommation d’énergie a bien chuté ces dernières années et viens placer les IPS entre les deux autres types. Le contraste reste pour le moment limité et inférieur à ce qui se trouve sur les dalles TN ou PVA. Les dalles IPS sont en général assez bien homogènes.

 

J’ai volontairement fait l’impasse sur les dalles MVA qui n’apportent plus rien à ce jour et devraient totalement disparaître du marché.

Dalle brillante ou mate ? I il faut là aussi se poser la question de vos conditions d’utilisation. Si vous travaillez uniquement dans une pièce obscure dépourvue d’éclairage direct, de fenêtre ou de toute autre source qui génère des reflets, alors un écran brillant peut être une solution intéressante en faisant gagner un peu de confort. Mais comme nous n’avons que très rarement nos écrans dans ce genre de pièce, la majorité d’entre nous devra s’équiper d’une dalle mate pour ne pas désintégrer le peu de confort gagné par un problème de taille : les reflets ! Et même avec une dalle mate une casquette d’écran est un confort non négligeable.

Taille et résolution

La taille dépend de votre mode de travail, si vous êtes du genre à avoir plein de papier en plus du clavier entre vous et l’écran, une grande taille est un confort non négligeable ! Si par contre vous avez le nez collé a l’écran oubliez les grandes tailles. Pour rappel, un écran doit être placé entre 40cm (pour un 17 ») et 75 cm (pour un 27′‘) des yeux de l’utilisateur. Ces chiffres tiennent compte de l’accommodation (mise au point) et de la convergence de notre vue afin d’en réduire la fatigue.

La résolution est intimement liée à la taille de l’écran, celle-ci définit le nombre de choses que vous pourrez afficher sur l’écran. Plus celle-ci est importante : mieux c’est ! Attention, car certains écrans proposent des valeurs de résolution particulièrement faibles pour leur taille. Voici une liste des résolutions par taille,  par exemple un écran de 22 » ne doit pas proposer une résolution inférieure à 1680×1050 pour un format 16:10.

  • 15″ : 1024*768 en 4:3
  • 17″ : 1280*1024 en 4:3 et 1440*900 en 16:10
  • 19″ : 1280*1024 en 4:3 et 1440*900 en 16:10
  • 20″ : 1600*1200 en 4:3 et 1680*1050 en 16:10
  • 22″ : 1680*1050 en 16:10
  • 24″ : 1920*1200 en 16:10
  • 30″ : 2560*1600 en 16:10

 

 

Les options et la connectique

Avec la connectique, vous avez pas mal de « choix » issus d’un bon nombre de connecteurs différents, mais il vous faut surtout choisir, entre le numérique (DVI, HDMI…) ou l’analogique (VGA). Ce choix varie en fonction de votre ordinateur et des connectiques qu’il propose. Le VGA peut être bien utile dans certains cas de figure pour brancher un matériel plus ancien, mais pour une utilisation classique utilisez une liaison numérique ; cela évitera les problèmes de parasites divers liés aux transferts de données analogiques et à leur conversion.

Dans les options proposées par les différents modèles, il y a bien les haut-parleurs… mais bon… en revanche, il y a une option qui ne se trouve pas sur les écrans d’entrée de gamme, mais qui reste un must en matière d’écran dédié à la photographie : L’orientation portrait/paysage ! Lorsque vous travaillez des photographies au format portrait sur un écran en position paysage, vous n’utilisez qu’une petite partie de la dalle, pouvoir pivoter l’écran de 90° est un gros plus !

Portez également une attention particulière aux rotations, inclinaisons etc… que propose certains modèles. Un pied ajustable en hauteur est bien pratique aussi.

VGADVIMini DisplayPortHDMI

 

Contraste et Luminosité

La luminosité : elle définit la puissance lumineuse de l’éclairage de votre écran. Celle-ci est calculée en candela par mètre carré (cd/m2). Ce n’est pas le paramètre le plus important.
Le contraste définit la différence entre les points noirs et blancs de l’image, c’est la faculté qu’a votre écran de resituer les noirs le plus profondément possible malgré une luminosité importante. En photographie, il nous faut idéalement un contraste réel (et non dynamique) de 1:1000, seuls les meilleurs écrans proposent une telle valeur. Choisissez donc un écran qui s’approche au plus près de cette valeur et qui ne passe pas sous la barre des 1:600

Restitution des couleurs

La qualité de la restitution des couleurs est bien évidemment importante. Celle-ci s’exprime en un calcul différentiel, entre la couleur demandée et la couleur affichable : le Delta E ou dE. Plus cette valeur est élevée plus la différence est importante. Un Delta E égal à 0 indique deux couleurs identiques. Avec un dE inférieur à 2, la différence de couleur est difficilement visible à l’oeil, avec un dE supérieur à 4 la différence est flagrante.

 

L,a et b correspondent aux coordonnées de couleur dans l’espace CIE Lab pour chacune des couleurs.

Pour un écran 22 », on observe ci-dessus le dE94 pour différentes couleurs.

 

Calibrer l’écran

Créer le profil ICC de votre écran se fait en deux étapes :

 

Calibrage

À cette étape, c’est à vous d’agir en définissant les valeurs pour la luminosité, le contraste, et les trois couleurs primaires : rouge, vert et bleu. Si vous êtes équipé d’un logiciel et d’un écran qui supporte la technologie DDC, l’intervention au niveau des réglages de l’écran ne sera pas nécessaire, ceux-ci seront gérés automatiquement par le logiciel. Commencez par restaurer les réglages d’usine de votre écran et lancez vous !
Le calibrage, c’est donc : régler votre écran sur les valeurs souhaitées, et ces valeurs sont les suivantes :

Le gamma : Celui-ci est égal à 2.2 avec Windows et 1.8 chez Apple, si vous utilisez un écran Apple sous Windows il est préférable de calibrer le gamma à 1.8.

La température de couleur : exprimée en Kelvin celle-ci dépend de votre habitude de travail. Je ne rentrerai pas dans les détails inutiles et tout choix peut être bon en fonction de vos besoins. En choisissant une température de 5000 K vous travaillez avec une lumière du jour légèrement jaunie, c’est idéal pour la presse et l’édition. Pour un travail plus porté vers l’informatique et le web, préférez une température de 6500 K qui correspond à la lumière du jour, c’est plus « universel ». Si votre logiciel le permet mesurez la température native de votre écran ! si celle-ci est par exemple de 5850 K alors c’est très bien ! conservez là, en vous éloignant le moins possible de cette valeur la stabilité sera meilleure. Sinon, coupez la poire en deux avec une valeur de 5500 ou 5600 K par exemple.

 

5000 K5600 K6500 K9300 K

 

Le point blanc : 100 cd/m² est un très bon réglage pour un écran placé dans une pièce à éclairage « classique à sombre ». Ajustez ce réglage entre 90 et 140 cd/m² en fonction de votre environnement ! 90 pour travailler dans le noir et 140 dans une pièce très claire.

Le point noir : J’aurais tendance à vous dire … Le moins possible ! mais sachez que 0,1% de la valeur du point blanc est une référence « haute » pour le point noir. Seul les meilleurs écrans y parviennent ! Donc avec un point blanc à 100 cd/m² atteindre un point noir de 0,1 cd/m² est tout simplement idéal ! Nous l’avons vu dans la partie « contraste et luminosité », cette définition du point noir influe sur les détails les plus sombres de vos photographies, avec un point noir trop haut des détails ne seront pas visibles dans les ombres. Sur certains logiciels au lieu de demander la valeur du point noir, il vous est demandé la valeur du contraste, celle-ci est égale à : Point blanc / Point noir

Caractérisation

A présent que votre écran est calibré, il vous faut le caractériser, en créant un profil ICC (enfin en demandant à votre soft de le faire). Ce profil va mémoriser la différence qu’il y a entre la valeur théorique d’une couleur et la valeur réellement affichée par votre périphérique. Cette différence sera ensuite appliquée aux photographies, etc., et ce, pour compenser l’imprécision de l’écran. Une fois la caractérisation effectuée vous ne devez en aucun cas toucher aux réglages de l’écran ! sinon tout est à refaire.

Il vous faudra un temps d’adaptation, car en général les écrans sont paramétrés pour paraître très lumineux et très blancs, les réglages d’usine ne correspondent donc absolument pas aux choix de votre calibrage (les écrans lors de leur sortie d’usine sont fréquemment réglés à 9300K, 250 cd/m² …).

 

Calibrer cela change la façon de voir les choses, d’où son extrême importance !

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